Quelque part dans une province française, à l’époque des Années Folles, un quatuor bourgeois va se trouver dans une tempête amoureuse. La Comtesse, amante de Dorante, s’éprend le temps d’un regard du Chevalier Damis qui lui-même est le tendre ami de la Marquise. Le coup de foudre est réciproque, mais l’aventure n’est pas du goût de Dorante ni de la Marquise. Blessés dans leur intimité, les deux amoureux délaissés vont alors élaborer un stratagème pour récupérer leurs chers infidèles. Les valets ne sont pas en restent : eux aussi en copiant leurs maitres se laissent emporter dans ce tourbillon d’amours contrariés.
Je ne connaissais pas ce texte de Marivaux et ce fut un vrai plaisir de le découvrir. Marivaux, en grand maître de la Manipulation avec un grand M : mensonges, faux semblants, tromperies, ruses et même fake news (oui c’était un visionnaire !) sont au rendez-vous.
Un vrai plaisir aussi cette pièce pour son décor magnifique, la scénographie d’Emmanuelle Roy et la mise en scène de Ladislas Chollat basées sur des entrées et sorties multiples très fluides et les belles lumières d’Alban Sauvé (dont un superbe feu d’artifice). En transposant cette intrigue dans les Années Folles, Ladislas Chollat montre que le texte a un petit coté intemporel pas désagréable.
Et pourtant des détails m’ont gênée : le jeu de certains comédiens n’est pas à la hauteur des autres ainsi le patois et la diction du père de Lisette est absolument incompréhensible (au point de regarder les surtitres en anglais pour le comprendre), je sais que c’est le texte de Marivaux qui le fait parler en patois mais je ne saisis pas l’intention du metteur en scène, c’est un brin énervant et loin d’être comique. Jérôme Robart qui est le chevalier gascon Damis a bien plus l’accent corse que gascon, ça lui fait perdre un peu de crédibilité même si cela nous porte à sourire. Simon Thomas, le serviteur de Dorante, passe son temps à geindre et à pleurnicher mais c’est l’histoire qui veut ça et c’est le seul aspect de la pièce qui me dérange un peu.
Hormis ces quelques points que l’on peut oublier facilement, on se laisse emporter dans cette valse des sentiments orchestrée par Marivaux et même si on se doute de la fin, on y prend beaucoup de plaisir.
Au théâtre Edouard VII jusqu’au 5 janvier 2020.