Lecture

Bretzel blues – Rita Falk

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Falk. Rita Falk.

Qu’est ce qui a bien pu pousser cette honorable commis de bureau originaire d’Oberammergau en Allemagne à se lancer dans la littérature policière ? Serait-ce la proximité quotidienne d’un époux, lui-même policier de profession ? Possible … Quoi qu’il en soit, voilà qu’en 2010, elle décide de faire paraître la première enquête de son Commissaire Eberhofer, sous le titre « Winterkartoffelknödel », paru sous nos latitudes en 2017 chez Mirobole Editions sous le titre « Choucroute maudite ». Forte d’un succès outre-rhin, l’auteure a réitéré l’année suivante avec un deuxième opus intitulé (allez, je vous épargne la version originale cette fois !) : « Bretzel Blues ».

C’est justement ce titre que je vous propose de juger. Aussi, faites entrer l’accusée … littéraire !

La Police et l’Allemagne. Une longue histoire d’amour. Les policiers allemands et la France … Egalement. Allez soyez honnêtes, qui ne vient pas de penser à Derrick rien qu’au seul rapprochement de ces deux mots « policier » et « allemand » ? Celui ou celle qui a déjà somnolé un après-midi sur son canapé devant les chaines TV du service public peut en attester. Pour faire simple, notre estimé pays voisin nous a envoyé pratiquement autant de policiers que le Canada nous a expédié de chanteurs … Et maintenant, les voici également imprimés sur les rayonnages de nos librairies (les policiers pas les chanteurs). Alors, « Bretzel Blues », un simple policier de plus ?

Pas vraiment, car Rita Falk n’est pas une auteure ordinaire. Non. Ce qui se dégage avant tout de sa plume, c’est une vraie force de caractère. Dans son écriture, dans ses personnages et dans la façon de mener l’intrigue.

Disons le tout de suite, l’auteure a adopté une écriture au ton très décalé. L’humour pointe son nez à chaque chapitre (pour ne pas dire presque à chaque page). Bien sûr, vous ne rirez pas aux éclats, ce n’est pas l’ambition. Toutefois, ces touches amusantes viennent démontrer qu’un roman policier ne doit pas forcément être froid comme la mort pour être intéressant. Par ailleurs, le ton léger, désinvolte se double d’un style incisif. Les phrases sont courtes et singent le « parlé ». D’habitude peu adepte de ce dernier, je dois avouer que je me suis laissé prendre au jeu et j’ai adoré.

J’ai tout autant adoré les personnages, tous flamboyants, à commencer par le principal : le Commissaire Franz Eberhofer. Franz … Franz … Un prénom bien élégant, que l’on imaginerait plutôt sorti de la Cour viennoise de l’Impératrice Sissi, pour désigner un homme flemmard (si, si c’est l’auteure elle-même qui le dit) et plus attiré par la bière et les femmes que par son enquête. Autre qualité de notre homme, il n’hésite pas à jouer du revolver pour régler le moindre problème. Cela lui en vaudra plus d’un pour le coup … dont le premier a été d’être muté dans une bourgade paumée de Bavière : Niederkaltenkirchen (Excellent exercice de diction au demeurant). Et on ne s’arrête pas là puisque le lecteur pourra faire la connaissance de son entourage proche : le Papa, la Mémé, le Léopold et j’en passe et des meilleurs. Inutile de dire que Rita Falk les a particulièrement soignés dans les descriptions qu’elle fait … Cela crée un ensemble épique, mais terriblement attachant, car une des forces de l’auteure est de parvenir à nous faire aimer des personnages qu’à première vue, chacun pourrait prendre pour … des « beauf ».

Et l’intrigue dans tout ça ? Hé oui, après tout nous sommes dans un roman policier. Bien évidemment, elle n’est pas banale. « Bretzel Blues », comme son titre ne l’indique pas, va emmener notre Commissaire aux trousses de l’assassin d’un … directeur de collège. Je m’en tiendrai là pour garder le suspens intact, disons seulement que ce personnage est loin d’être celui que l’on pense. Peu ordinaire aussi, la façon de traiter l’intrigue. Habituellement, dans un roman policier, vous suivez pas à pas l’enquête. Ici, non. Enfin, si mais pas seulement. En effet, vous allez vivre le quotidien du Commissaire Eberhofer … sa vie, son œuvre … et au milieu de cela, vient se glisser l’enquête. Aberrant ? Non au contraire, cela donne un côté profondément humain à ce livre. Le lecteur a presque l’impression de connaître les protagonistes de l’histoire. Une bouffée d’oxygène très plaisante à lire.

Au final, vous avez entre les mains un « page turner ». Ce n’est pas haletant, ce n’est pas angoissant, ce n’est pas sombre comme la nuit. Non, c’est au contraire amusant, terriblement impertinent et formidablement captivant. Il ne m’aura fallu que deux jours et demi pour dévorer les 300 pages de ce roman.

Mirobole Editions vient de faire paraître le troisième volet des aventures d’Eberhofer, sous le titre « Pression fatale ». Un seul conseil … Laissez-vous tenter.

Accusée Rita Falk, vous êtes acquittée !

« Bretzel Blues » – Rita FALK aux éditions Mirobole (en version poche chez J’ai lu)

Une chronique signée Laurent Moulin

 

 

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