Musique et Danse

La Fille du régiment

Photo Elisa Haberer

L’argument de la Fille du Régiment est plutôt simple : Marie, orpheline a grandi parmi le 21 ème régiment de soldats de l’armée française. Au cours de leurs manœuvres, ils rencontrent la marquise de Berkenfield, qui se dit la tante de Marie et veut la récupérer pour l’élever selon son rang. Marie n’a pas envie de quitter son régiment encore moins depuis que Tonio son amoureux y a été intégré.

C’est en 1840 que Gaetano Donizetti créé cet opéra-comique en deux actes et en français. C’est en 2007 à la Royal Opera House de Londres que Laurent Pelly a créé cette version énergique et facétieuse avec les superbes décors de Chantal Thomas. Certes il change les uniformes napoléoniens du livret d’origine en tenue de poilus de la guerre 14/18 et adapte (modernise) les dialogues avec Agathe Mélinand mais sans que l’histoire soit dénaturée. L’histoire est mouvementée, on n’a pas le temps de s’ennuyer.

D’ailleurs, il ne faut pas longtemps au public de l’Opéra Bastille pour être conquis dès le début du premier acte, lors de la troisième scène, le duo entre Marie et le sergent Sulpice, recueille déjà des applaudissements soutenus et ça va aller crescendo. D’autant que de nombreuses pantomimes et autres farces vont alimenter cette version si drôle et émouvante. La leçon de chant de Marie au second acte est drôlissime puisqu’elle met son savoir-faire à mal chanter.

Avant que le rideau ne se lève, la direction nous annonce que Julie Fuchs est souffrante mais qu’elle chantera quand même. Petite angoisse, car elle tient le rôle central, mais l’angoisse sera vite levée. Julie Fuchs impose sa présence dans le jeu sur scène et dans le chant avec une totale maitrise dès le début de l’opéra. Avec sa natte qui rebique façon Fifi Brindacier et son air de garçon manqué, elle incarne avec force crédibilité la vivandière Marie. Moment de grâce : dans le premier acte, son ‘Il faut partir’ est une vibrante déchirure lorsqu’elle est emmenée loin du régiment par la Marquise. Il fallait un amoureux à la hauteur du talent de Julie Fuchs et c’est chose faite en la personne de Lawrence Brownlee qui joue un Tonio puissant vocalement et dont le jeu est très expressif. Son ‘ Ah mes amis, quel jour de fête ! ‘ est une merveille et sera longuement salué par la salle enthousiaste.

Photo Elisa Haberer

Autour d’eux gravitent des personnages talentueux et hauts en couleur : Lionel Lhote est le sergent Sulpice, un baryton qui nous enveloppe avec sa voix et ses manières de père protecteur de Marie. Celle qu’on adore détester dès le début de l’histoire c’est la Marquise de Berkenfield jouée la délicieuse Susan Graham, son phrasé fait mouche et son chant est charmeur. Il y a aussi la Duchesse de Crakentorp incarnée par Felicity Lott, toujours à l’affut du moindre manquement pour instiller avec ironie des remarques piquantes toujours avec une voix bien ronde. Enfin Hortensius ; le valet de la Marquise joue à merveille son rôle d’intendant avec une efficacité vocale remarquable.

La direction soignée et attentive d’Evelino Pido montre que l’Orchestre national de Opéra de Paris fait merveille autant sur les marches militaires que sur les morceaux plus délicats. Les Chœurs de l’Opéra national de Paris sont très présents et répondent fort bien aux solos des différents chanteurs.

Le public de l’Opéra Bastille redécouvre avec un plaisir non feint cet opéra-comique de Gaetano Donizetti. Le final est une longue série d’ovations pour tous les protagonistes.

A l’Opéra Bastille jusqu’au 20 novembre 2024.

Photo Elisa Haberer

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